samedi 15 décembre 2012

Biblio-mat




Le livre électronique est en train de tuer le livre papier, okay. C'est la Mort des petites librairies que les tablettes annoncent, soit. 





Et pourtant, une petite librairie résiste encore et toujours à l'envahisseur. Elle ne se trouve pourtant pas dans notre chère Armorique française, mais de l'autre côté de l'Atlantique, à Toronto. Chez The Monkey's Paw, on utilise le marketing pour contre-attaquer, avec le Biblio-Mat :


Il faut avouer que dans le principe, c'est plutôt bien vu : un aspect old-school qui rappelle les couvertures de la maison d'édition Penguin Books, le geste enfantin des distributeurs automatiques de jouets et le plaisir de laisser le hasard décider (la surprise d'obtenir une bague en plastique ou une tour Eiffel porte-clefs en moins). Pour 2 dollars, vous aurez donc un "vieux" livre, datant au minimum de 25 ans, l'objectif étant visiblement d'écouler ces fonds qui se vendent difficilement.

Quand on voit l'âge de certains bouquins qui ornent les étagères de nos bibliothèques municipales, le potentiel est énorme ! Bon visiblement, les livres vendus sont quand même en bon état, ce qui élimine cette solution de pilon automatique d'emblée. Dommage. En revanche, j'imagine bien un système de prêt surprise basé sur les fonds qui galèrent à sortir des étagères : "Oh vous avez gagné le droit d'emprunter un livre sur l'astrophotographie, si j'étais vous j'attendrais quelques jours avant de jouer au loto."



Le dispositif a tellement de succès que le libraire a maintenant des difficultés à trouver suffisamment de livres anciens pouvant être vendus à seulement 2 dollars pour alimenter la machine. Un comble pour une librairie dont le slogan est "prenez garde à ce que vous souhaitez..."

vendredi 21 septembre 2012

Feed the brain


Les zombies et les bibliothécaires, ça a toujours fait bon ménage. Le lien est particulièrement flagrant le matin, vers 8 ou 9h. Quand on n'arrive à percevoir les collègues qu'à travers un voile de sécrétions oculaires séchées. Mais parfois, le bibliothécaire souhaite prolonger cet état au-delà du premier café matinal (ça lui fait d'ailleurs une bonne excuse pour être désagréable avec le public).

On avait ainsi vu plusieurs "zombie walk" de bibliothécaires, manifestant contre des coupes budgétaires, notamment à New-York en 2010. Le mot d'ordre : "More libraries, more brain" et "Better undead than unread".










En 2011, c'était la Miller Library, du McPherson college, qui publiait son guide d'utilisation de la bibliothèque, intitulé Library of the living dead. Où l'on apprend que dans les bibliothèques, on a des informations ET des outils pour toutes les demandes, y compris concernant la survie à une attaque zombie.


Depuis 2011, la SALIN (South Australian Library and Information Network) met quant à elle en vente un calendrier Zombies in the library. Trois bibliothécaires expliquent dans cette vidéo comment les "zombrarians" ont envahi la bibliothèque :


Pour feuilleter (et acheter) cette petite merveille, c'est ici. Au moins, ça vous changera des chatons de votre collègue Birgit.

mardi 31 juillet 2012

The Book Show


Attention, ceci est un article à teneur culturelle (ceux qui sont allergiques, c'est le moment de fuir). Je vais vous parler d'une exposition, donc, et ce pour deux raisons : premièrement, la thématique est en rapport avec les livres (rapport à la cohérence avec mon métier, ça fait un peu caution intellectuelle). Deuxièmement parce que cette exposition est une petite tuerie. Enfin était, puisqu'elle s'est terminée le 28 juillet. MAIS, fait rare, la majeure partie des oeuvres présentées sont visibles sur un blog dédié. Et, peanuts sur la glace au chocolat, les visuels sont de très bonne qualité ; on en prend plein les mirettes.

A l'origine du projet, la galerie Daniel Maghen, située dans le 6e arrondissement de Paris. L'exposition The Book Show est basée sur un principe simple : des illustrateurs interprètent à leur sauce le livre qui les a le plus marqué, que ce soit un roman, une BD ou un album, destiné à la jeunesse ou aux adultes... On s'amuse alors à retrouver la patte de certains dessinateurs (Juanjo Guarnido, Benjamin Lacombe ou encore Chabouté, qui délaisse le noir et blanc pour une illustration du Seigneur des anneaux magnifique) et surtout à en découvrir de nouveaux, aux styles complètement différents. Certains sont assez classiques, mais il y a beaucoup de jolies découvertes à faire. Certains des livres dont se sont inspirés les artistes sont facilement identifiables, et les grands titres de la littérature (fantastique pour la plupart) sont bien représentés : Frankenstein, Cendrillon, Le magicien d'Oz, Dracula, Max et les maximonstres, Astroboy... Il y a forcément un de ces livres qui va vous rappeler des souvenirs de lecture, et ces illustrations donnent autant envie de se replonger dedans, que de découvrir les titres que vous ne connaissez pas.

Malgré la fin de l'exposition, n'hésitez pas à vous déplacer à la galerie. Ils organisent régulièrement des expositions d'illustrateurs (beaucoup venant de la BD) et les originaux, bien que loin de mes moyens (j'envisage une vente sauvage des collections de la bibliothèque pour me financer), sont à vendre sur leur site.

Ozamu Tezuka's Tetsuwan Atomu
by Ashley Wood
Stephen King's It by John Kenn Mortensen


Jeanne-Marie Leprince de Beaumont's
Beauty and the beast by Mindy Lee



Richard Matheson's I'm a legend by Michael Fleming
Charles Perrault's Cinderella
by Claire Wendling
Tomi Ungerer's The Three Robbers
by Ludovic Chesnot



L. Frank Baum's The Wonderful
Wizard of Oz by Mali Siri





Herman Melville's Moby Dick
by Jim kay

samedi 23 juin 2012

A quand une bibliothèque Karl Lagerfeld ?

L'auteur d'un article se demandait dernièrement "Et si le livre électronique signait la fin de notre civilisation ?" Moi, j'aurais plutôt tendance à penser (Karl serait d'accord sur ce point j'en suis sûre) que le retour des mocassins à glands nous mènera bien plus sûrement à l'Apocalypse. Mais je ne juge pas, chacun ses peurs irrationnelles.

On découvre tout d'abord, fait rare chez les détracteurs du livre électronique, qu'il a lui-même abandonné définitivement le livre papier, arguments à l'appui : possibilité d'adapter la taille des caractères à sa vue (les éditeurs de livres papiers en gros caractères ayant effectivement d'énormes efforts à faire tant du point de vue de l'offre que du packaging), se déplacer avec toute sa bibliothèque à portée de doigt, pour un poids dérisoire,  la facilité d'utilisation, l'accès gratuit aux classiques libres de droit... A priori, c'est vendeur.

Puis, comme pour se faire pardonner d'avoir proféré des insanités, s'ensuit un exercice de dézingage dudit objet :

"Je pouvais lire, c'est tout." Il se trouve que ça tombe plutôt bien, la seule chose que l'on puisse exiger d'un livre étant de pouvoir le lire. C'est son but dans la vie : être le média entre la parole de l'auteur et le lecteur. Les livres audio, par exemple, sont des livres, au même titre que le livre papier : ils restituent un texte (oui, ça paraît trivial, mais un livre est essentiellement composé de texte. Sauf s'il s'agit d'une bande dessinée bien entendu, mais c'est un autre débat). Quel que soit le contenant, l'essentiel pour le lecteur est de pouvoir accéder au contenu. Que ce contenant prenne la forme d'une édition de collection, d'un fichier informatique, d'un cd audio ou d'un livre de poche, l'essentiel est que chacun trouve celui qui lui convient le mieux pour accéder à ce contenu.

"Il manquera toujours l'essentiel : la main du papier, la typographie, l'odeur de l'encre, la satisfaction de sentir la reliure au creux de la paume." Et moi qui pensais que l'essentiel dans un livre, c'était le texte. Otons donc cet artifice, et laissons sur les étagères de bibliothèques des livres vides, mais beaux, rangés par couleur et par senteur : un peu d'encre à solvants ou d'encre à eau aujourd'hui ? On peut même vous proposer du Lagerfeld, au parfum "capiteux", "à l'odeur subtile de vieux manuscrit".


" Le livre électronique, ça n'est pas la fin de l'édition, mais celle des bibliothèques". Le vrai problème, c'est qu'il y aura toujours des gens qui n'auront pas les moyens, que la question soit financière ou sociale,  d'accéder aux textes. J'ai d'ailleurs un doute quant à l'infériorité de coût d'une collection de la Pleiade comparée à celui d'une liseuse et de textes numériques (bien que le coût de ces derniers soit, je suis bien d'accord, une aberration totale. Coucou les éditeurs). Permettre aux gens d'accéder à ces textes est l'une des missions des bibliothèques, parmi tant d'autres. C'est pourquoi je ne m'inquiète pas vraiment de la pérennité de ces dernières. S'il le faut, les bibliothèques prêteront des liseuses, au même titre que des livres papiers (oh mais attendez, c'est vrai qu'elles le font déjà. Les bibliothèques auraient donc une capacité à s'adapter aux changements de la société ? Damned).
Alors pas la peine de vous lamenter sur le sort des bibliothèques. D'abord, ceux qui le font y mettent rarement le bout d'un panard, et puis ce n'est pas en pleurnichant que les choses vont bouger.

Quant à la bibliothèque familiale, aux livres "annotés par quelque aïeul, aux dos luisants où les nerfs croisent les tranches dorées, cette odeur de vieux papier et de cuir", tient pour moi du fantasme, ou d'une lubie de collectionneur. Ceux-là ne fréquentent pas les bibliothèques, puisqu'elles ne permettent pas de posséder. Libre à chacun de nous de choisir ce que l'on souhaite collectionner, mais une collection n'est jamais qu'une accumulation d'objets, de biens matériels. La culture ne se collectionne pas. Elle gonfle nos tripes et nos cerveaux, pas nos étagères (c'est beau comme un slogan de mai 68 tiens).

L'exercice d'auto-flagellation auquel se livrent certains lecteurs de livres numériques me laisse dubitative. Cela devient une honte de lire des livres sans décimer la moitié de la forêt équatoriale. On n'appelle pas cela de l'amour. Ca n'est même pas de l'acharnement thérapeutique (je doute qu'un objet qui existe depuis tant de siècles finisse par lâcher la rampe si facilement). Si le livre numérique a suffisamment d'avantages pratiques pour convaincre un tel amoureux du papier de ne plus sniffer sa dose quotidienne de papier moisi, c'est qu'il ne doit pas être si diabolique.

Et puis en cas de manque aigu, les bibliothèques pourront toujours organiser des visites sensorielles de leurs réserves. Moisissures et poussière garanties.



jeudi 31 mai 2012

Books and beyond

Dans les bibliothèques, on trouve des livres sur tous les sujets, pour répondre à toutes les questions possibles qui peuvent traverser les cerveaux ô combien tortueux de notre public. Enfin si on a bien fait notre job. Ce qu'on s'évertue à faire, nous bibliothécaires, avec l'acharnement d'un employé de la SNCF décidé à placer votre journée un cran au-dessus d'Armageddon (oui, j'ai subi quelques désagréments ferroviaires ces derniers temps, j'ai besoin de faire ma catharsis). 

Mais comme le livre n'est pas toujours le média le plus approprié pour répondre aux demandes, on y trouve aussi des CD, des DVD et même Internet tout entier (tout du moins si le service informatique de la ville n'a pas déclaré la guerre des tranchées à la bibliothèque. Ou vice-versa.) Pour promouvoir ces supports, et appâter l'usager par la même occasion, l'Alberta Library (un consortium de bibliothèques canadiennes) a lancé une campagne de publicité appelée "Books and beyond". Certes j'ai un sacré train de retard (sûrement un sanglier sur la voie), puisqu'elle date de 2008. Mais je ne pouvais passer à côté de ces deux vidéos, diffusées sur Internet et... à la télévision ; en France par contre, on peut toujours s'asseoir pour voir un spot vantant les mérites des bibliothèques passer pendant la pause pub de Pékin express...

Admirez le travail :


Ma préférée personnellement, ayant moi-même une mère beaucoup trop portée sur les travaux manuels :


J'attends désormais le prochain emprunteur du Roman des maisons closes avec impatience (et une sélection de sites références sur les MST donc).

mercredi 14 mars 2012

Si tu veux des fruits de mer, Kafka aller à la bibliothèque

Vous allez me dire que, après le bibliobus québécois, il y aurait beaucoup trop de véhicules à moteur dans ma bibliothèque idéale. Mais en toute franchise là, je ne pouvais pas résister. Voici donc les camions utilisés par la Johnston County Library pour transporter les livres d'une bibliothèque à l'autre (notez qu'ils ont besoin de plusieurs camions. Je ne sais pas s'ils ont la folie des grandeurs, mais là où je travaille, une deudeuche suffirait largement) et, accessoirement, se faire de la pub :


Avantage, ils attirent l'oeil, pour ça il n'y a aucun doute. Et comme le précise la bibliothèque, la première pensée qui nous vient est "Ah oui, le nom de cette entreprise est foutrement bien trouvé" (traduction approximative, j'en conviens), chaque camion détournant un classique de la littérature pour l'associer à un produit dont on ferait la publicité (façon rétro, c'est tendance ma chérrrie). Et puis, juste en dessous, on peut y lire "Disponible à la Johnston County Library". Et là, soit on est complètement déçu : "C'est malin, maintenant j'ai envie de manger des fruits de mer / d'acheter des couches / de prendre des médicaments / de tuer du cafard, et je ne vais y trouver que des livres", soit on se dit que quand même, "ces bibliothécaires, ils roxent de la douchette". Au final, je ne sais pas si cette campagne de pub a réellement été efficace, mais moi je trouve ça joli. Et ça rendrait très bien sur une deudeuche, c'est certain.


dimanche 29 janvier 2012

Et mon coléoptère, il est grabataire peut-être ?

On le dit, on le répète, on le crie sur les toits (bibliothécaire j'hurle ton nom), on s'énerve et on essaie de le faire rentrer dans le crâne mou de nos lecteurs à grands coups de douchette et de Dewey (reliée, c'est plus efficace). Plus qu'un combat, c'est un sacerdoce. Notre côté militant sans doute. Et susceptible, probablement. Le métier de bibliothécaire a changé, beaucoup plus vite que son image, qui lui est restée collée à la couenne plus sûrement qu'une sangsue à triple ventouses.

Alors quand on tombe sur une description des bibliothèques et de leurs humbles serviteurs digne du 19e siècle, ça nous hérisse un peu la moquette élimée (je parle pour les bibliothèques qui n'ont pas réussi à avoir le budget rénovation adéquat). Une description comme celle sur laquelle je suis tombée, par hasard, dans la bande dessinée Un après-midi un peu couvert, de Philippe Squarzoni :





Bon, documentaliste ou bibliothécaire on sait pas trop, mais de toute façon c'est à peu près le même combat.














Ca a le mérite d'être clair. Bibliothécaire ça rime avec grabataire (au sens propre comme au sens figuré, notez). 

Nous voilà donc grabataires, hémiplégiques, invalides, et bien sûr totalement à l'ouest concernant l'informatique (j'aime tellement les fiches que je m'en suis fait un collier, c'est vous dire). Soyons clairs, je ne trouve ça agréable ni pour les hémiplégiques et invalides, ni pour les bibliothécaires. Associer des catégories de personnes en fonction des préjugés négatifs communs qui leur collent aux basques, c'est d'un banal affligeant. Je veux dire, associer les bibliothécaires et les hémiplégiques à des community managers ou des gogo danseuses, voilà qui serait intéressant, sociologiquement parlant (certains collègues (je ne dénoncerai pas) se plaignent par exemple de la discrimination quotidienne due à un manque flagrant de potentiel sensuel de notre métier. Et c'est bien dommage).





"Un problème avec les livres" ? Moi aussi à vrai dire, il m'arrive même d'en jeter, probablement un signe avant-coureur de l'apocalypse.

"Passer son temps au milieu des livres, les lire, puis les conseiller". Oui, moi aussi j'aimais bien l'idée. Puis je suis devenue bibliothécaire. Et j'ai fait plein d'autres choses. Notamment, je "surfe sur Internet" pour bosser, pas "au lieu de bosser". Ce qui ne m'empêche pas de tomber sur des idiots à l'orthographe éclatante.

Tiens justement, puisqu'on en parle. La Bibliothèque est un "cimetière" et les livres des "tombes", ça me rappelle vaguement quelque chose que j'ai lu récemment. Un certain Yann Moix y parle de la mort des bibliothèques, au sens "noble" du terme. Heureusement, cela fait bien longtemps que les bibliothécaires (ne lui déplaise, je désigne par là diverses professions, du discothécaire qui gère la piste de danse, au vidéothécaire qui regarde des vidéos sur Youtube toute la journée, sans parler des animateurs multimédia, "nouvelle" spécialité tout droit sortie des feux de l'enfer) ne sont plus là que pour conserver des livres poussiéreux, qui doivent répondre à une exigence intellectuelle et littéraire élitiste. Quant à mettre en doute que les bibliothèques soient là pour transmettre des "connaissances", on atteint le pompon de la pomponette. Le tout étant, en revanche, d'arriver à dépasser cette idée de "temple du savoir" (personnellement, je rentre plus facilement dans un couloir de métro tapissé d'urine que dans un temple). Les réponses à cet article n'ont pas tardé, vous pouvez aller voir sur Hortensi.usFace écran et les Carnets d'Outre-Web.


Si même Rimbaud s'y met.

Bon je râle, mais cela m'a fait plutôt sourire de trouver cette anecdote. Au final, on trouve dans ce livre une jolie petite histoire sans prétention, et plutôt agréable à lire. Et qui n'a rien à voir avec les bibliothécaires ni les hémiplégiques, comme cet article ne le suggère pas.
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